03 octobre 2012

Chronique Menstruelle

Le Vent du Nord

Pendant que vous passiez vos vacances à Miques Aux Noces, effectuiez un roadtrip de baisé avec vos amis dans le Cher/Tarn/Périgord/insérez ici le nom d'un département du genre/ j'ai un peu pris l'air moi aussi. Devant des scènes, dans des files d'attente, des voyages en train interminables. Ou dans les bras d'inconnus.
Avez vous passé de bons moments à la seule et unique bonne boîte de Francfort ? Dégusté de délicieux pâtés de foie artisanaux sur une nappe à carreaux, dans un champ, à l'ombre d'un olivier centenaire ? Ou êtes vous juste resté chez vous.. Dites moi au moins que la musique dans vos oreilles vous faisait vibrer. Au pire, je vous rassure deux fois : Primo, qu'importe le lieu où vous étiez. Car nous savons tous que depuis Mars 2010, tout a l'air délicieusement branché dès qu'on lui flanque un filtre Instagram dessus.

Deuzio, le son, nous nous en chargeons.


Mes vacances ont d'abord consisté à écouter le dernier album de Grasscut en boucle et à zoner sur Nancy, ville morte aux beaux jours. Ensuite, fin juin, me voici aux Eurockéennes de Belfort avec toute la bande, à crier "Apéro" à chaque coin de tente. Le premier jour, hormis l'horrible prestation de Mars Volta, nous avons eu droit à la surprenante Christine, noire de monde, ou aux envoûtants Londoniens de Factory Floor pour finir la soirée en beauté. Le Samedi, les foudres d'Odin nous tombent littéralement dessus, me privant (notamment) de l'affriolante "Plage à Pédro". Cette dernière nous promettait, un air lubrique au fond des yeux, Kavinsky, Sebastian, Electric Guest, Kindness, Django Django et Busy P en petite tenue sur les bords du lac de Malsaucy. Je ne vous cache donc pas ma désérection post C2C de la veille. Le dimanche, pour sécher mes larmes mais pas mes pieds, j'ai notamment eu droit à Sir Jack White, servi sur un plateau d'argent, ou à une Lana Del Rey affublée d'un joli serre tête. Entre temps, mes pieds revêtus d'élégants sacs poubelle, déesse de l'esthétisme, je traversais non sans mal les centaines de mètres de terrains boueux du festival, un kébab à sept balles à la main, une écocup dans l'autre. Vous auriez dû voir et ressentir ce sentiment général de solidarité et de compassion, ces festivaliers braves et courageux, cet amour fanfare de la musique. Favorisé par quelques grammes dans le sang évidemment. Avec rage et passion, je peux cependant te le dire d'avance : Malsaucy je t'aurai. Ai peur, car j'abuserai de toi la prochaine fois.

Plus tard, je traîne à Paname capitale du crime, place des Vosges, et me retrouve en sérieuse discussion avec Madeleine, 87 ans. Madeleine n'a pas de petits enfants, Madeleine a perdu son mari, Madeleine vient tous les jours ici et laisse couler sa vie bien gentiment. "Bref je suis vieille". Seulement, au bout d'une demi heure, c'est l'ennui. Oui, c'est sympa le partage inter-générations : mais il y a des limites. Ma bonne action faite, je m'éclipse sans bruit telle l'amante d'une nuit. Plus tard, j'apprends que le projet "soirée au Wanderlust" est avorté. Dans mon grand désespoir, je passe alors au Marais me changer les idées.. Quand je vois sur une place le montage d'une scène en plein air, à l'occasion du Festival des Nuits d'été. "Encore un groupe indé à la con qui va jouer ce soir" me dis-je. J'ai soudain d'autres considérations lorsque je vois sur Fessebouc que The Aerial joue justement à cet endroit, ce soir là même exactement. Non que je crache sur l'électro d'Etienne de Crecy qui passait au Wanderlust : mais voir le quatuor de Nancy/Liverpool plus ou moins à l'improviste me semble assez réjouissant. 
 
J'en parle donc avec frénésie à l'amie chez qui je loge. "Tu vas voir c'est pas mal du tout, ça vient de chez moi, ça a sa petite réputation." Ce fut, hélas, une mauvaise idée : j'ai eu l'exacte impression de vouloir l’emmener à une sorte de rave party, où quelqu'un de mal intentionné pourrait mettre de la DROGUE dans son verre afin de profiter d'elle, pour ensuite la rendre accro à des SUBSTANCES et enfin l'introduire contre son gré sur un marché clandestin roumain/polonais/mettre ici un random pays de l'est/ de prostitution. Un instant je me suis dit : aurais-je perdu toute mon éducation morale, serais-je devenue une de ces chicks qui rentrent chez elles talons à la main à six heures du matin, après une nuit de dépravation ? Ou mon amie était-elle restée dans toute la splendeur de la chasteté enfantine ? Pour me rassurer, j'ai opté pour la deuxième option. Je me suis couchée à 22 heures en ruminant ma déception et me suis rattrapée le lendemain.

Je vous ferai grâce de mes deux semaines à Cannes. Non que je veuille vous faire envie par cette phrase précédente : mais j'ai dû prendre des antibiotiques et n'ai pu me baigner ni m'exposer au soleil la moitié de mon séjour. Ce qui en gros réduit de 90% l’intérêt d'être dans le sud. En même temps, Cannes, c'est so mainstream tuvoi. Entre deux piqûres de moustiques, j'ai donc passé mon temps vissée devant l'ordi sur fond de Son Lux. A attendre bien sagement le last Animal Collective, le nouvel XX et la sortie du dernier Balthazar dont le premier single met déjà l'eau à la bouche.
 
Début Août, j'arrive à Oslo, un air d'Of Montreal dans la tête : le courroux des dieux de la pluie dans mes bagages. Un peu dans la dèche. Ayant nulle part où loger. Compter sur le fait que j'allais rencontrer une accueillante bande de scandinaves aux yeux bleus dans l'avion était une mauvaise idée. Je prends alors une nuit dans une auberge de jeunesse dégueu, fume clope sur clope (à 12€ le paquet) et rencontre un trentenaire Autrichien qui m'invite à sortir (dégueu aussi, mais il payait les bières). Notre improbable duo se rend alors à une soirée, tout à fait au hasard, et commence à enfiler les pintes à 70NOK (environ 8€).
C'est un bar lambda, qui dans sa prolongation comporte une arrière cour. Dans une caravane, des mecs mixent. Il y a des guirlandes partout, des blondes, du bon son, de l'alcool à flots. Après une heure de son timide, l'endroit explose et devient rapidement un dance-floor. Les corps s'entremêlent, le sol s'encrasse, on prend des photos. 


(Photo non contractuelle)
C'est là que je rencontre cette fille aux cheveux délicieusement bouclés, qui pétille des yeux derrière ses grandes lunettes et se trémousse dans sa robe corail, adorablement vintage. Elle m'adresse un regard, danse avec moi des minutes durant, puis s'approche en me criant son prénom : "Matja !" Les échanges sont complices, les verres trinqués, les danses se succèdent et à la fin de la soirée, sans rien d'autre qu'un sourire, je lui tends mon cellulaire.

Le lendemain, Matja, dans une autre robe vintage, m’emmène alors découvrir Oslo de jour. Les quartiers branchés, l'immense parc Vigeland et ses centaines de statues inquiétantes, la Carl Johans Gate, sorte de Champs Elysées miniatures.. Elle paresse avec moi au port d'Akker Brygge, m’emmène voir des squats pleins de graffitis, ou un coin dédié au street art près d'une rivière. On partage musiques, clichés Français, moeurs et préjugés Norvégiens, quelques mots dans la langue de l'autre, allongées sur l'herbe verte. Pause au Kaffebreneriet pour prendre une bonne grosse part de carrot cake. On prend le bus sans payer, on gambade dans la ville, on rentre dans des Second Hand Shops. Il fait beau, le ciel est bleu, on mange du saumon. Nous sommes des enfants terribles et l'idylle est parfaite.

Mais à Oslo, pas le temps de rester sobre très longtemps. Surtout lorsque l'on sait que les jeunes Norvégiens font partie des plus grands consommateurs d'alcool d'Europe. Matja m'initie à la ville, cette fois de nuit. Ca bouge de partout, ça fourmille, c'est tellement vivant qu'on se croirait de jour. Les gens tournent à la bière, la musique fait tourner la tête des gens, les gens tournent. Je tourne. Matja m'emmène dans des bars intrigants, où les murs sont remplis d'autocollants, où trônent dans des vitrines des playmobils et des figurines rétro. Où il y a des pièces de puzzle en vrac sur les tables, où l'imagination ne fait que fuser. Dans un bar rempli de bornes d'arcades 80's, je découvre Making Marks 


qui se produisait ce soir là à l'occasion du pré-festival d'Øya. LE festival Indie/Rock d'Oslo qui, sur quatre jours et trois scènes, propose des Artistes tels que Bon Iver, Metronomy, Chromatics ou Kindness.. Oui, Kindness encore. Hélas, lorsque Øya commence, je prends déjà le train pour Stavanger, petite ville cliché Norvégienne sur la côte Ouest. Puis Bergen, un peu plus au Nord. Une semaine d'escapade pour voir autre chose que la Capitale, ramener des magnets « I ♡ Norway » et envoyer des cartes postales aux grands parents.

Pour se dire que la Norvège artistique, ce n'est pas que le célébrissime tableau d'Evdard Munch, le Cri, pour réaliser à quel point, putain, la vie est chère là bas et puis pour manger encore plus de saumon. Les shooters avec un inconnu, les bars, les nuits d'ivresse, se succèdent. Les rencontres aussi. Le sourire de Matja toujours là.

Sinon, les fjords étaient jolis.
CEK.



 

ALIAT